Le lancer de chaussures sur Bush : Un geste qui résume l'opinion de tout un peuple. |
AUTEUR: Abdelbari ATWANعبد الباري عطوان |
Utiliser ses « chaussures » pour exprimer une opinion est un acte étrange et pas du tout professionnel, de l’avis de nombreuses personnes, surtout de la part d’un journaliste, mais le geste est en soi compréhensible si l’on sait que ce journaliste ressent les frustrations et l’oppression créées par la dégradation de la situation du pays et le martyre de plus d’un million d’enfants et de proches, provoqués par ce « libérateur » US. M. Talabani, le leader gaucho socialiste qui a vécu deux époques historiques, a décrit ainsi le président Bush : « C’est un grand ami du peuple irakien. Il nous a aidés à libérer notre pays…Il a fait un usage courageux de sa position dirigeante…On a une démocratie et des droits humains…La prospérité se réalise peu à peu… » Et si c’est ce grand et brave ami-là qui a ravagé le pays, tué des milliers de gens de son peuple, fait fuir un quart des Irakiens à l’intérieur et à l’extérieur du pays, ramené la guerre civile dans le pays, instauré un confessionnalisme abominable, fait de l’Irak le pays le plus ruiné du monde, alors que pourrait faire de pire un ennemi ? Avec un ami pareil, on n’a pas besoin d’ennemis, comme dit le proverbe anglais. Mais où est donc la bravoure quand on envahit le pays le plus anciennement civilisé du monde, après l’avoir assiégé pendant plus de 13 ans, lui interdisant d’importer jusqu’à des crayons, sans parler d’armes et de munitions, et tout cela sans base légale, en violation flagrante du droit international ? C’est vrai que M. Bush est un ami de MM. Talabani et Al Maliki. Il est un ami de tous les complices qui ont facilité l’invasion de leur pays par la manipulation et le mensonge envers le peuple irakien. Ils ont été récompensés par le maître US qui les a mis au pouvoir, mais il n’est absolument pas un ami du peuple irakien, de la majorité de ses fils et filles honorables. Cette majorité a une histoire glorieuse de résistance aux envahisseurs et elle a toujours soutenu la cause de l’Oumma arabo-musulmane. Le journaliste irakien qui a jeté ses chaussures sur le président irakien, même si on n’est pas d’accord avec sa méthode, n’a fait qu’exprimer la conviction de la majorité silencieuse, broyée et brûlée par le chaos qui menace sa vie et sa sécurité : il n’y a ni eau ni électricité ni travail dans un pays considéré comme l’un des plus riches du monde en ressources naturelles et en cerveaux créatifs.
Ce journaliste est avant tout un citoyen empli de zèle envers son peuple et il n’a fait que ce que font ses semblables tous les jours en Occident, quand ils protestent contre les responsables de leur pays, quand ils jettent de oeufs pourris et des tomates. Le président Bush n’est pas mieux que Blair et son vice-Premier ministre John Prescott ou autres (la liste est longue). Ce qui est regrettable, c’est que ce président, rejeté par ses propres citoyens qui ont refusé avec mépris d’élire le candidat de son parti à la dernière l’élection présidentielle, ne trouve un bon accueil que chez les dirigeants arabes, alors que partout ailleurs il est accueilli par des manifestations hostiles. Si on donnait aux Irakiens ordinaires la possibilité d’exprimer leurs sentiments à l’égard de Bush comme les autres peuples, ils jetteraient leurs chaussures, car il mérite d’être humilié bien pire que par des jets de chaussures. Il y a six ans, les télévisions arabes et autres ont diffusé avec extase les scènes de la « libération américaine du grand peuple irakien ». Elles ont montré en boucle une image d’un Irakien frappant un portrait du président Saddam Hussein avec sa chaussure, au milieu de la jubilation des bernés et des manipulés. L’histoire se répète : beaucoup d’Irakiens rendent hommage à leur président martyr Saddam Hussein en frappant le président Bush en chair et en os et non son portrait. Ce journaliste, qui représente le vrai visage de l’Irak, a donné à voir au monde entier ce que pense son peuple des « libérateurs » et de leurs complices.
Source : æÏÇÚ áÇÆÞ ÈãÌÑã ÍÑÈ Article original publié le 15/12/2008 |